20.03.2017 • Droits humains

Cameroun : Orange coupe l’internet à la minorité anglophone sur ordre du gouvernement

Sur fond de manifestations de la minorité anglophone du Cameroun, le régime de Paul Biya a décidé de passer à la manière forte en coupant totalement l’accès à l’internet dans les provinces concernées. Les trois opérateurs du pays, dont le français Orange, se sont empressés d’obtempérer à l’injonction gouvernementale.

Publié le 20 mars 2017

Le Cameroun est devenu le théâtre de la plus longue coupure d’accès à Internet (à la fois sur le réseau filaire et mobile) enregistrée sur le continent africain à ce jour. Depuis le 17 janvier 2017, les deux régions anglophones du pays (Nord-Ouest et Sud-Ouest) sont privées de connexion. La mesure fait suite à une série de manifestations, dont certaines ont été violemment réprimées par la police, pour protester contre les discriminations dont fait l’objet la minorité anglophone du pays et réclamer plus d’autonomie. Les régions anglophones rassemblent 20% de la population camerounaise estimée à quelque 22,5 millions d’âmes. (...)

« Nous recevons tous les jours des messages de détresse émanant de cette partie du Cameroun, beaucoup de messages de personnes qui sont inquiètes aussi, indique Julie Owono, responsable Afrique de l’ONG Internet sans frontières. Notamment au moment où la répression s’est intensifiée – arrestation de leaders politiques ou de simples badauds pris avec des tracts en leur possession – et qu’aucune information ne filtrait via Whatsapp, Viber… Il y a trois mois encore, on avait des images, par exemple, des manifestations qui se sont déroulées à l’université de Buea (fin décembre 2016, NDLR) et qui ont été violemment réprimées par la police. » Les ONG de défense des droits numériques et les Nations Unies ont déjà demandé à maintes reprises aux autorités camerounaises de rétablir la connexion à Internet dans les régions concernées.

Lire l’intégralité de l’article sur le site de la chaîne télévisée France info

Orange fait partie des trois opérateurs assurant l’accès à internet dans ces régions. Contactée par le Centre de ressources sur les entreprises et les droits humains, l’entreprise française a répondu qu’elle était tenue d’obéir aux injonctions du gouvernement.

L’ONG spécialisée Access Now a publié une lettre ouverte aux opérateurs concernés dont Orange, et encourage les internautes à les interpeller en ligne sur eux.

Comme le souligne en effet une activiste interrogée par France Info, le silence des opérateurs internet présents au Cameroun contraste avec l’attitude de leurs concurrents confrontés à des situations similaires où des gouvernements autoritaires coupent l’internet pour étouffer des manifestations démocratiques :

« Le contexte camerounais s’avère très particulier, explique Julio Owono. D’habitude, les entreprises privées sont promptes à se désolidariser des autorités dans ce type de situation. Nous avons également essayé de les contacter mais aucune n’a donné suite. C’est la première fois que nous sommes confrontés à ce cas de figure. Les abonnés s’en prennent aujourd’hui ces opérateurs. On ne peut pas leur en vouloir puisque nous n’avons pas la preuve que les firmes concernées sont en désaccord avec cette censure. Par ailleurs, contrairement à l’Éthiopie (où l’internet mobile a été suspendu pendant plus de deux mois en 2016, NDLR), l’état d’urgence avait été déclaré dans les régions concernées. Ce qui n’est pas le cas au Cameroun. Ce qui se passe aujourd’hui dans les régions anglophones n’a aucun fondement légal, ne serait-ce qu’au regard même de la loi camerounaise. »

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