21.06.2017 • France

L’autorité de régulation met à nu les abus des concessionnaires autoroutiers

La privatisation des autoroutes françaises continue à faire parler d’elle. Depuis 2005, les trois sociétés concessionnaires - Vinci, Eiffage et Abertis - sont vertement critiquées pour les profits qu’elles accumulent, sans véritable contrepartie. Aujourd’hui, c’est au tour de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) de dénoncer les manipulations des trois multinationales dans le cadre du dernier plan autoroutier : un tiers des investissements annoncés seraient inutiles ou déjà comptabilisés dans les plans précédents, et les chantiers restants auraient été confiés à leurs propres filiales de BTP à un coût largement supérieur à celui du marché.

Publié le 21 juin 2017

Les autoroutes françaises avaient été données en concession en 2005 à trois multinationales du secteur du BTP, les françaises Vinci et Eiffage et l’espagnole Abertis. Pour faire taire les polémiques à répétition sur les hausses des tarifs, les profits excessifs des concessionnaires et l’opportunité de renationaliser ces infrastructures, le gouvernement de Manuel Valls avait opté pour le lancement d’un énième plan autoroutier, autorisant de nouvelles augmentations des péages en échange d’investissements réels de la part des firmes concernées (lire notre enquête : Investissements autoroutiers : de maigres créations d’emplois, un gros enrichissement des actionnaires).

C’est ce plan autoroutier que l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) a vigoureusement critiqué dans un avis rendu le 19 juin. Pour l’autorité de régulation, les sociétés concessionnaires ont la fâcheuse tendance de confier les investissements promis (échangeurs, murs anti-bruit, passages pour les animaux, etc.) à leurs propres filiales de BTP, à un prix souvent très supérieur à celui du marché, comme le rapporte Le Monde :

En comparant avec les références habituelles des prix dans les travaux publics et avec des cas récents de chantiers autoroutiers, l’Arafer considère que 82 % des opérations du plan autoroutier sont trop chères de 10 % à 30 % par rapport à ces éléments de comparaison. De quoi alimenter un soupçon récurrent : les sociétés privées concessionnaires surestimeraient-elles des prix de travaux réalisés au profit de leurs filiales de BTP ?

Lire l’intégralité de l’article sur le site du Monde.

En outre, 23 opérations sur les 57 investissements annoncés, représentant environ 34% du coût total de 803,5 millions d’euros du plan d’investissement annoncé par l’État en 2016, n’auraient tout simplement rien à faire dans ce plan. « En l’état des informations qui lui ont été fournies, l’Arafer estime qu’il n’apparaît pas justifié de faire supporter par l’usager de l’autoroute le financement de [ces] 23 opérations (...) soit parce que les projets correspondent à des obligations déjà prévues dans les contrats, soit parce qu’il n’est pas établi qu’ils sont strictement nécessaires ou utiles à l’exploitation de l’autoroute », a indiqué l’autorité dans son communiqué.

Conclusion : « Les augmentations des tarifs de péages prévues excèdent le juste niveau qu’il serait légitime de faire supporter aux usagers. » L’avis rendu par l’autorité n’ayant pas valeur contraignante, la balle est maintenant dans le camp du nouveau gouvernement. C’est la loi Macron qui avait créé l’Arafer, pour compenser l’asymétrie d’information entre entreprises concessionnaires et pouvoirs publics. Maintenant qu’elle a prouvé son utilité, il reste à passer à l’acte.

Olivier Petitjean

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Photo : Emmanuel Huybrechts CC

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