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Nouveau rapport — La Caisse des dépôts et consignations, financeur public des énergies du passé

Publié le : 12 décembre 2017

En marge du « One Planet Summit » organisé par la France ce 12 décembre, deux ans après la signature des Accords de Paris sur le climat, l’Observatoire des multinationales, en partenariat avec 350.org, s’est intéressé aux investissements publics français dans les énergies fossiles, les plus polluantes – charbon, pétrole et gaz –, en particulier ceux de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), de ses filiales et des portefeuilles de participations qu’elle héberge (BpiFrance, Fonds de réserve pour les retraites, Ircantec, La Banque postale...).

La France accueille le 12 décembre 2017, pour célébrer les deux ans de l’Accord de Paris, le « One Planet Summit ». L’événement, qui verra la venue à Paris d’une cinquantaine de personnalités et chefs d’État, est placé sous le signe de « la finance publique et privée au service de l’action climat ». L’accent est mis sur la mobilisation du secteur de la finance et sur les nouveaux instruments financiers à mettre en œuvre pour financer la transition énergétique et les « solutions climat », par exemple les obligations vertes. Il est peu ou pas question de l’autre face du problème : la perpétuation, voir l’augmentation, du financement des énergies fossiles. Or, si la France et la communauté internationale sont sérieuses quant à l’objectif de maintenir le réchauffement des températures globales en deçà des 2ºC, plus un euro ou un dollar ne devrait aller au financement du charbon, du pétrole ou du gaz.

Cette étude se penche sur les investissements d’une institution financière publique française, la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Celle-ci non seulement joue un rôle essentiel, et multiple, dans l’économie française, gérant, en plus de ses fonds propres, une partie importante de l’épargne et des cotisations retraites. Elle se veut également exemplaire en matière d’engagement pour le climat, et s’est positionnée comme une pièce maîtresse non seulement du sommet du 12 décembre, mais de toute la stratégie française de faire de Paris un centre mondial de la finance verte.

Les principaux enseignements de cette étude sont les suivants :

* Tout d’abord, la Caisse des dépôts et consignations et l’ensemble des fonds qu’elle gère ou héberge sont très peu transparents sur leurs placements, à l’exception du Fonds de réserve pour les retraites. Comprendre leur politique d’investissement réelle par delà les discours officiels « verts » et identifier leurs participations éventuelles dans le secteur des énergies fossiles est donc très difficile. Parce qu’il s’agit en l’occurrence de fonds publics, et au vu de l’importance de l’enjeu climatique, la transparence devrait être de rigueur si les promoteurs de la finance climat veulent gagner la confiance du public.

* Il est néanmoins possible d’identifier des investissements de la Caisse des dépôts et consignations dans des firmes impliquées directement dans les énergies fossiles, comme c’est encore le cas d’Engie (dont la Caisse des dépôts et sa filiale CNP Assurances possèdent presque 4% des actions), de l’opérateur gazier GRTgaz (dont la CDC et ses filiales détiennent 25%), et dans une moindre mesure dans des firmes minières qui figurent parmi les principaux producteurs mondiaux de charbon (Anglo American notamment).

* Une partie de l’argent issu de l’épargne des Français, dont le livret A et le livret de développement durable et solidaire, est placé sur les marchés financiers via le « fonds épargne » de la CDC. Malgré l’absence de transparence, il est possible de savoir que le fonds épargne possède une participation significative dans la firme parapétrolière Vallourec et dans des firmes dont le charbon représente jusqu’à un quart de leur chiffre d’affaires. Ce qui paraît en contradiction totale non seulement avec l’impératif climatique, mais aussi avec le « développement durable » vendu aux épargnants.

* La Banque postale détient des participations, via ses filiales de gestion d’actifs, dans plusieurs entreprises charbonnières.

* Bpifrance détient des participations importantes dans trois firmes parapétrolières françaises, TechnipFMC, Vallourec et CGG, pour une valeur de presque un milliard d’euros. Ces firmes sont impliquées dans de nombreux nouveaux projets d’extraction de pétrole et de gaz, dont certains sont présentés dans ce rapport. En outre, la Bpifrance soutient des projets fossiles, comme Yamal LNG en Russie, dans le cadre de sa nouvelle mission de garantie publique à l’export. Elle est amenée dans ce cadre à soutenir des firmes dont elle est elle-même actionnaire, Technip en l’occurrence.

* Le Fonds de réserve pour les retraites, dont nous avions analysé le portefeuille du point de vue de ses investissements dans les énergies fossiles il y a trois ans, n’a pas diminué son exposition au secteur, malgré l’Accord de Paris. Il a certes exclu de ses placements certaines firmes exclusivement vouées au charbon, mais en les remplaçant par d’autres firmes du secteur des fossiles. Globalement, ce sont donc toujours plus de 2 milliards d’euros en actions et en obligations que ce fonds de retraite consacre au charbon, au pétrole et au gaz. L’Ircantec ne fournit que des informations minimales sur son portefeuille (qui confirment toutefois la présence de firmes du secteur des énergies fossiles), et l’Erafp encore moins.

* Cet argent public peut être mis en relation, directement ou indirectement, avec plusieurs nouveaux projets d’exploitation de charbon, pétrole et gaz, que nous présentons dans la deuxième partie de ce rapport. Il contribue notamment ainsi à l’ouverture de nouvelles « frontières » pour l’industrie pétrolière et gazière, comme l’Arctique ou le pre sal au Brésil.

Téléchargez le rapport (pdf, 27 pages).

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