08.03.2016 • Finance

Sanofi, ou la restructuration permanente au service des dividendes

La direction de Sanofi vient d’annoncer un nouveau plan d’économies et de suppressions d’emploi. C’est la troisième restructuration depuis 2009. Malgré la lutte emblématique des « Sanofi » et le départ du très controversé directeur général Chris Viehbacher, l’orientation reste la même. 5000 emplois ont déjà été supprimés en France depuis 2008, notamment dans la R&D. Retour sur le processus de « restructuration permanente » auquel est désormais soumise l’entreprise, aux dépens des salariés et de la recherche en santé publique, et pour le seul bénéfice des actionnaires.

Publié le 8 mars 2016 , par Natalia Hirtz

Sanofi n’est pas une entreprise en difficulté. Cela ne l’a pas empêché d’annoncer, en novembre 2015, un nouveau plan d’économie de 1,5 milliard d’euros d’ici 2018, via un recentrage de son portefeuille d’activités et une réorganisation en cinq grandes unités commerciales. Le mardi 2 février 2016, le groupe a dévoilé aux représentants de ses employés français les conséquences de son plan de réorganisation : plus de 600 postes seront supprimés sur trois ans en France, soit 2% des effectifs. Le géant pharmaceutique a également engagé des négociations pour réduire ses effectifs dans le reste du monde. L’issue de ces discussions est attendue pour la mi-2016.

Ces orientations se situent dans la continuité de la stratégie mise en œuvre depuis 2009. L’arrivée de Chris Viehbacher à la tête de Sanofi cette année là entraîne le groupe dans la tourmente de la finance. La nouvelle direction générale lance un vaste plan de restructuration qui fut qualifié à l’époque par la firme de « processus permanent » : des restructurations constantes, cherchant à rassurer les actionnaires et touchant progressivement tous les salariés et en particulier l’activité de recherche et développement, visée par une stratégie de démantèlement et d’externalisation. Au fil des cessions et des plans de réorganisation, Sanofi a supprimé plus de 5000 emplois en France depuis 2008. En tenant compte des recrutements et des acquisitions opérés en parallèle par le groupe, 1290 emplois nets ont été perdus depuis cette date. Entre temps, Sanofi est devenue la première capitalisation boursière du CAC 40 et s’est placée dans le top cinq mondial de la pharmacie.

Transforming I (2009-2011) : démantèlement de la R&D et optimisation fiscale

En février 2009, Sanofi annonce un plan pour les deux ans à venir, lequel vise à « transformer Sanofi en leader global de la santé ». À cette fin, trois axes principaux sont détaillés par la direction : l’organisation et l’approche en R&D ; les opportunités de croissance externe (fusion et acquisition) pour renforcer la diversification ; et l’adaptation de l’entreprise aux enjeux à venir [1].

Pour diversifier et « adapter l’entreprise aux challenges à venir », les coûts sont réduits de 4 milliards d’euros. Étonnamment, cette adaptation aux nouveaux « challenges » passe par une diminution drastique du budget alloué à la R&D en interne. 40% des programmes de recherche sont coupés, ce qui, selon les termes de Chris Viehbacher, devra permettre au groupe de se concentrer sur « des projets à forte valeur et de réattribuer [les] ressources sur des partenariats externes » [2].

Sanofi multiplie les partenariats de R&D avec des laboratoires d’universités publiques, captant ainsi les innovations sans devoir en supporter les coûts. En outre, en sous-traitant la recherche aux start-ups, la firme réalise un glissement du budget R&D de l’interne vers l’externe, ce qui permet de transformer les « coûts fixes », indépendants du niveau d’activité de l’entreprise, en « coûts variables » [3]. Par le recours à la sous-traitance, l’entreprise peut adapter ses dépenses de recherche et développement au niveau de ses ventes en peu de temps. Cette flexibilité a évidemment des conséquences sur l’emploi dans la sous-traitance. Cette stratégie industrielle pose néanmoins question lorsqu’on sait que le temps nécessaire au développement d’un médicament est de 12 à 15 ans.

Ce processus de démantèlement de la recherche interne aura pour conséquence la réduction de 20% de l’effectif en R&D en France, pays où le groupe concentre la plupart de ses activités économiques et qui emploie autour de 30% de ses salariés mondiaux (26 933 emplois en 2014). Sous l’appellation de « Plan de sécurisation de l’emploi », Sanofi supprime 1300 postes, procède à la fermeture de quatre sites de R&D et à la vente du site de Porcheville dans les Yvelines [4]. Pourtant, le groupe bénéficie, en 2011, de 130 millions d’euros de crédit d’impôt recherche (CIR) [5] ,alors que le montant de cette aide fiscale destinée à soutenir et encourager la R&D n’était que de 70 millions en 2008, lorsque la quasi-totalité des produits était issue de la recherche interne.

En 2012, Sanofi aurait dû payer un total de 600,6 millions d’euros d’impôts en France, mais grâce à différents avantages fiscaux, le groupe en a économisé une grande partie : le CIR lui a permis de supprimer 129,9 millions d’euros ; les réductions d’impôts liées au mécénat (10,4 millions d’euros) et d’autres niches ont fait grimper la ristourne à 144,6 millions d’euros. En outre, le groupe a créé en février 2012 une banque interne basée en Belgique, Sanofi European Treasury Center (SETC), chargée du paiement des fournisseurs et de l’investissement dans ses filiales. Ce qui lui permet de bénéficier du système belge des « intérêts notionnels », un dispositif fiscal qui permet aux multinationales de déduire de leur impôt un intérêt calculé en fonction des fonds propres de leur filiale située sur le territoire belge. En transférant une partie de son chiffre d’affaires vers la Belgique, la firme a échappé au paiement de 22,8 millions d’euros d’impôts (par rapport à une localisation en France) [6].

Transforming 2. 0 (2012-2015) : la direction passe à la vitesse supérieure

Le 6 novembre 2011, Sanofi annonce ses nouveaux objectifs pour la période 2012-2015. Cette fois-ci, le discours est clairement adressé aux actionnaires. Chris Viehbacher, le directeur général, déclare : « Nous nous fixons comme objectif une croissance du chiffre d’affaires d’au moins 5% par an en moyenne sur la période 2012- 2015. Le taux de croissance moyen du BNPA (bénéfice net par action) des activités sur la même période devrait être supérieur à la croissance moyenne des ventes. Notre objectif d’augmenter le taux de distribution du dividende à 50% reflète l’amélioration des perspectives de la société et notre engagement à créer de la valeur pour nos actionnaires [7] ». Afin d’atteindre ces objectifs, Sanofi annonce de nouvelles économies de 2 milliards d’euros.

Les nouvelles transformations impliquent notamment l’annonce du désengagement du site de R&D de Toulouse (614 emplois), la suppression de la recherche à Montpellier (200 emplois), des licenciements, des départs dits « volontaires » et l’approfondissement du processus d’externalisation de la R&D. Chris Viehbacher envisage d’en arriver à sous-traiter 50% de la recherche. Cet objectif implique un processus de concentration des activités de recherche dans quelques pôles situés à proximité de grands centres hospitaliers universitaires, des centres de recherche académique et des universités.

Les restructurations sont rapides et sans concessions : la recherche est stoppée à Montpellier, le service support présent sur tous les sites est délocalisé à Lyon et Paris, les sites de Toulouse et de Quétigny sont vendus, et la production de nombreux vaccins est arrêtée, ce qui touche particulièrement le site de Marcy l’Etoile (avec 567 postes supprimés). Au total, 1767 emplois sont supprimés et 700 postes sont transférés hors de leur région d’origine [8].

La lutte des « Sanofi »

Bien que les travailleurs n’aient pas réagi contre la mise en œuvre du premier plan, lorsque le groupe dévoile l’ampleur des nouvelles « transformations », ils s’y opposent énergiquement. Le mouvement s’enclenche à Toulouse. Le jeudi 5 juillet 2012, les travailleurs du secteur de R&D arrêtent le travail et sortent spontanément devant les grilles de l’entreprise pour protester contre l’annonce du désengagement du groupe. Le jeudi suivant, travailleurs et syndicats prennent le bus pour assister à une réunion du comité central de l’entreprise (recherche) à Paris. Après ces deux jeudis de lutte, les travailleurs décident d’inaugurer les « jeudis de la colère » : des manifestations organisées tous les jeudis (jusqu’à janvier 2013) dans les rues de Toulouse, mais aussi dans d’autres sites comme celui de Montpellier.

Entretemps, l’intersyndicale a déposé un recours devant la Cour d’appel de Paris en demandant la requalification du plan de départs volontaires en plan de reclassement pour la division R&D. En mars 2013, la Cour leur donne raison [9]. Cette victoire juridique sera néanmoins de courte durée, car quatre mois plus tard, la Direction de Sanofi présentera un nouveau plan identique au premier. En janvier 2014, vingt-cinq sites sont touchés par les actions de débrayage. L’intersyndicale réclame « une augmentation collective substantielle pour tous », « un engagement de maintien des sites, des activités et des emplois » et « la résorption de la précarité » [10]. Mais, en même temps, la CFDT, la CFTC (majoritaires au niveau national dans la R&D) et la CGC signent le plan de restructuration autorisant la suppression de 709 postes dans la R&D, au lieu de 914 comme prévu par le plan rejeté par la justice. L’accord est validé par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE).

Six salariés de Montpellier, ainsi que la CGT et SUD Chimie, attaquent le nouveau plan en justice [11]. Le 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Versailles confirme la signature de la DIRECCTE. CGT et salariés font appel, et la cour d’appel administrative de Versailles leur donne gain de cause le 30 septembre. À nouveau, la victoire n’est que relative, car grâce aux accords de départs dits volontaires, Sanofi est déjà parvenue à se défaire d’une grande partie des salariés. À Toulouse, il ne reste plus que 200 employés sur 614 et à Montpellier, 250 salariés étaient déjà partis depuis juillet 2012 (en octobre 2014, ils n’étaient que 800, alors qu’ils étaient 1500 en 2009) [12].

Le 25 juillet, la direction avait annoncé en place un nouvel accord pour augmenter les départs dits « volontaires », avec 150 départs supplémentaires aux 709 suppressions de postes prévues dans le plan de restructuration. L’accord est à nouveau signé par la CFDT, la CFTC et la CFE-CGC [13]. Une semaine plus tard, Sanofi se retrouve au centre d’un nouveau scandale : la fuite du projet « Phoenix ». Ce document confidentiel émanant de la direction de Sanofi, envisage la suppression de 1800 postes pour les deux années suivantes. La découverte tombe au bon moment pour les travailleurs, car les journalistes de « Cash Investigation », une émission de reportage de France 2, sont en train de réaliser une enquête sur les circuits financiers et se servent du projet Phoenix pour interroger Emmanuel Macron qui s’engage, devant les caméras, à parler avec le Président de Sanofi [14]. Quant à la direction du groupe, elle déclare que le plan n’est plus d’actualité.

Aucune de ces péripéties ne parviennent à freiner les plans de Sanofi qui annonce, début septembre, la vente du site de production de Quetigny (Côte-d’Or). Les travailleurs obtiennent grâce à leur mobilisation la sauvegarde de l’emploi lors du transfert, réalisé en avril 2015, au groupe pharmaceutique Delpharm. À Toulouse, le site est finalement vendu à Evotec qui prend l’engagement de maintenir l’emploi de plus de 200 travailleurs. Le plan de réorganisation de Sanofi prévoyait initialement de conserver 364 emplois, mais à la suite du plan social, les effectifs du site ont progressivement diminué.

Les patrons se succèdent, la logique boursière demeure

À la recherche d’un bouc émissaire pour absorber les mécontentements, le conseil d’administration décide à l’unanimité en octobre 2014 d’évincer Chris Viehbacher, lui reprochant une gestion en solitaire et un manque de communication. La direction générale du groupe sera assurée par intérim par le président du conseil d’administration, Serge Weinberg, jusqu’à la nomination d’Olivier Brandicourt, en février 2015.

La colère des salariés remonte lorsqu’ils apprennent le montant de la prime accordée à Chris Viehbacher pour son départ (4,5 millions d’euros) et le cadeau de bienvenue octroyé à son successeur, d’une valeur de 4 millions d’euros. Dans un contexte où le groupe continue à mettre en œuvre des mesures d’économies, cette nouvelle est accueillie comme un scandale, et même certains ministres du gouvernement français font connaître leur indignation.

Des conflits sociaux se répandent dans divers sites du pays. Les revendications ne concernent plus exclusivement l’emploi, mais pointent également les conditions de travail et environnementales. Cette fois-ci, ce sont les travailleurs de la production qui sont à la tête du mouvement. Ils savent en effet qu’après la réorganisation de la R&D, ce sera le volet production qui sera pointé, d’autant plus que cette branche faisait partie de l’un des objectifs principaux du plan Phoenix, qui parlait de « réduire l’empreinte industrielle [de Sanofi] en Europe ».

Alors que les conflits sociaux diminuent avec l’arrivée de l’été, la direction de Sanofi prépare de nouveaux missiles. Sept mois après son arrivée à la tête du groupe en remplacement de Chris Viehbacher, Olivier Brandicourt présente, le vendredi 6 novembre 2015, les nouvelles orientations pour les cinq ans à venir. Son plan vise une économie de 1,5 milliard d’euros et un nouveau recentrage des activités, à contre-courant de la stratégie de diversification mise en œuvre par son prédécesseur. En adoptant cette stratégie de recentrage, Sanofi ne fait que suivre le chemin emprunté par ses concurrents depuis quelques années, qui cherchent ainsi à atteindre une taille critique en se focalisant sur certaines spécialités.

Comme le montrent les graphiques ci-dessus, la stratégie de Chris Viehbacher avait permis de booster la croissance du groupe et, surtout, le montant des dividendes versés aux actionnaires. Sur ce plan, les objectifs prévus pour 2011-2015 ont été atteints de façon spectaculaire. L’explosion du montant des dividendes versés par Sanofi sur la période s’explique plus par la croissance de la part des bénéfices versés aux actionnaires (graphique 3) que par une augmentation absolue des bénéfices (graphique 4). En 2011, le taux de dividende du groupe Sanofi était de 24,1%. En 2013, il est de 97,87%, avant de diminuer légèrement à 83,74% en 2014. Depuis 2013, le groupe verse donc presque l’ensemble de ses bénéfices à ses actionnaires. Des bénéfices qui suivent la courbe inverse, puisqu’ils sont passés de 5,7 milliards en 2011 à moins de 4,4 milliards en 2014. C’est ce qu’on appelle « vider les caisses ».

2016- ? : le nouveau plan de restructuration du groupe

La diversification du groupe comportait néanmoins trop de risques aux yeux des actionnaires. En effet, la recherche et le développement de nouveaux médicaments est longue et risquée. Une stratégie de recentrage permet de gagner du temps. Le nouveau plan implique la simplification de l’organisation mondiale du groupe autour de cinq entités et le désengagement de certaines divisions perçues comme n’étant pas suffisamment en synergie avec ses objectifs.

La filiale de santé animale Merial et l’activité de médicaments génériques sont ainsi sur la sellette. En effet, le 15 décembre 2015, Sanofi annonce un accord à plus de 20 milliards d’euros pour échanger ses activités de santé animale contre celle de produits grand public du groupe allemand Boehringer Ingelheim. Sanofi envisage une opportunité d’échange similaire dans les médicaments génériques en Europe [15]. En acquérant les produits d’automédication de la société allemande, Sanofi pourrait devenir le premier groupe mondial de ce secteur, devant Bayer. De son côté, Boehringer Ingelheim s’est engagé à conserver les opérations commerciales, les centres de R&D et les sites de production en France « pour deux ans » [16]. Pas de quoi rassurer les travailleurs, surtout lorsqu’ils apprennent, en janvier, la fermeture du site de Porcheville (Yvelines), racheté à Sanofi en 2010 par l’Américain Covance, qui s’était engagé à maintenir l’emploi pendant cinq ans. Une fois cette convention arrivée à son terme, Covance a procédé à la fermeture du site, avec 128 licenciements à la clé [17].

Selon les déclarations officielles de la direction, le nouveau plan de réorganisation de Sanofi aura pour conséquence la suppression de plus de 600 postes en France. Mais le chiffre réel est en réalité presque double. En effet, la direction a annoncé la suppression de 400 postes à Sanofi Winthrop Industrie, filiale qui regroupe douze usines en France et emploie 5000 salariés, alors que 155 suppressions sont prévues à Sanofi-Aventis France (qui chapeaute les activités commerciales de la firme), s’ajoutant aux 150 postes laissés vacants suite aux réorganisations précédentes. Le plan pointe aussi une centaine de départs au siège. Enfin, si le groupe assure que le plan ne prévoit pas de licenciements dans la R&D, les 290 postes vacants au sein de cette filiale sont définitivement supprimés. Au total, plus de 1000 emplois sont donc directement impactés. La réorganisation comprend en outre le « transfert juridique » de 870 à 1000 postes vers les services centraux [18].

Bien entendu, ces suppressions de postes ne doivent surtout pas compromettre la production. À cet effet, le groupe a organisé une première réunion en septembre 2015 avec les syndicats de Sanofi Winthrop Industrie en vue de négocier un « accord de compétitivité », grâce auquel lequel le groupe espère augmenter la productivité de 20 à 25 % sur trois ans [19]. D’autres négociations sont en cours dans la division vaccins (Sanofi Pasteur) où la direction a averti qu’elle allait « dénoncer » les accords collectifs dont bénéficient ses salariés afin de négocier un nouvel accord réduisant le nombre de RTT de 21 à 12 jours [20].

La bourse ou la vie

Au nom de la préservation de la compétitivité, la France a débuté l’année 2016, avec l’annonce de réductions d’effectifs dans l’ensemble du secteur pharmaceutique (lire notre article). Ces « réorganisations » ne sont pas dues à la mauvaise santé financière des firmes, mais plutôt à l’asymétrie de plus en plus importante entre les intérêts des actionnaires et ceux des travailleurs. Si les dividendes versés en 1980 représentaient, en moyenne, la moitié des sommes consacrées aux investissements, en 2014, elles représentent deux fois et demie ce montant.

Selon les résultats publiés par Sanofi en février 2016, le groupe a enregistré un chiffre d’affaires annuel en hausse de 9,7% à 37 milliards d’euros, et son bénéfice net progresse de 7,7% pour atteindre 7,37 milliards d’euros. Sanofi a bénéficié d’un effet de change favorable, car à taux de change constant, ses bénéfices chutent de 0,9% tandis que ses revenus grimpent de 2,2% [Chloé Hecketsweiler, « En quête d’une nouvelle identité, Sanofi souffre mais sauve la face », Le Monde, 9 février 2016.]. Le groupe se ravit d’annoncer sa vingt-deuxième année consécutive de hausse des dividendes. Il propose à ses actionnaires un dividende de 2,93 euros par action au titre de l’exercice écoulé, contre 2,85 euros pour 2014.

Chez Sanofi, la rémunération des actionnaires est clairement annoncée comme objectif principal du groupe depuis 2011. Or plus la part des bénéfices versés en dividendes est grande, moins l’est la part réservée aux investissements. Ce qui explique les licenciements, la surcharge de travail, l’augmentation des cadences, la réduction des sites jugés moins compétitifs, et l’externalisation de la recherche. Et les travailleurs ne sont pas les seuls concernés : en 2014, l’entreprise a touché 17 millions d’euros d’aides indirectes de l’État français au titre du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi), censé favoriser l’emploi, et 125 millions au titre du crédit impôt recherche. Ou comment les aides d’État financent les dividendes et la casse sociale.

Natalia Hirtz (Gresea)

Cet article a été publié initialement, dans une version légèrement plus longue, sur le site du Gresea.

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Photo : Sanofi Pasteur CC

Notes

[2Interviewé par Gaëlle Fleitour, « Sanofi cherche son nouveau modèle de R et D », L’Usine Nouvelle, 8 décembre 2011.

[3Robert Navarro et Jean-Jacques Mirassou, « Sanofi doit être au service des malades, non des actionnaires ! », Le Monde, 1 octobre 2012.

[4Gaëlle Fleitour, « Sanofi cherche son nouveau modèle de R et D », L’Usine Nouvelle, 8 décembre 2011.

[5Créé en 1983, le CIR permet aux entreprises de déduire de l’impôt sur les sociétés 30% de leurs investissements R&D, dans la limite de 100 millions d’euros d’investissements (et 5% au-delà).

[6Voir notre article.

[7Communiqué de presse de Sanofi, 6/09/2011, « Sanofi annonce de nouveaux objectifs à long terme ».

[8Voir “La lutte des Sanofi pour les nuls”, Collectif Anti-Sanofric.

[9Gaëlle Fleitour, « Plan R&D : Sanofi devra revoir sa copie », L’Usine Nouvelle, 12 mars 2013.

[11Les arguments principaux des salariés et du SUD Chimie concernent : la discrimination entre salariés en termes de reclassements ; le surcroît du nombre de catégories professionnelles répartissant et ciblant les salariés en vue de leurs licenciements ; et la confusion de la DIRECCTE entre le « contrôle restreint » qu’elle doit effectuer et le « contrôle superficiel » qu’elle a réalisé, se tranchant derrière la signature de certains syndicats. Pour sa part la CGT prône des arguments plus formels pointant la validité des mandants des organisations syndicales signataires (CFDT, CFTC).

[12Alexandra Chaignon, « Sanofi : Une sacrée belle victoire ! », L’Humanité, 1 octobre 2014.

[13Voir “La lutte des Sanofi pour les nuls”, Collectif Anti-Sanofric.

[14Émission « Quand les actionnaires s’en prennent à nos emplois », Cash investigation (France 2), diffusée le mardi 3 mars 2015.

[15« Sanofi très actif dans la recherche de fusions et acquisitions », L’Usine nouvelle, Infos Reuters, 21 janvier 2016.

[16Catherine Ducruet et Anne Drif, « Sanofi met le cap sur les médicaments en vente libre », Les Échos, 16 décembre 2015.

[17Patrick Désavie, « Le site Covance de Porcheville va fermer », L’usine nouvelle, 19 janvier 2016.

[18Chloé Hecketsweiler, « Sanofi annonce la suppression de plus de 600 postes en trois ans », Le Monde, 3 février 2016.

[19Catherine Ducruet, « Sanofi va supprimer 600 emplois en France sur trois ans », Les Échos, 3 février 2016.

[20Emmanuel Grasland, « Sanofi Pasteur veut revoir ses accords sur le temps de travail », Les Échos, 7 décembre 2015.

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