02.07.2015 • Contre-rapport

Schizophrénie d’État : le véritable bilan annuel d’EDF

Après Total et Engie, l’Observatoire des multinationales publie un nouveau contre-rapport annuel sur EDF. Près de 70 ans après sa création, on a bien du mal à reconnaître l’ancien service public national de l’énergie et les valeurs qu’il incarne. Qu’il s’agisse de fiscalité, de droits des travailleurs ou d’environnement, quelle entreprise illustre mieux qu’EDF la schizophrénie de l’État actionnaire ?

Publié le 2 juillet 2015

Une entreprise encore formellement publique (dont l’État détient 84% des actions) qui distribue des quantités disproportionnées de dividendes et se trouve accusée régulièrement d’optimisation fiscale. Et qui s’oppose à la volonté expresse du gouvernement de réduire la part du nucléaire en France et de fermer la centrale Fessenheim.

Un ancien service public de l’énergie qui milite activement pour de nouvelles hausses de tarifs, alors que le prix de l’énergie a explosé depuis dix ans et que 5 millions de Français sont touchés par la précarité énergétique. Et qui cherche à étendre ses activités à l’étranger, où elle se comporte comme une multinationale « comme les autres ».

Une entreprise récemment choisie par le gouvernement français comme sponsor de la Conférence internationale sur le climat qui se tiendra à Paris en décembre 2015, alors qu’elle continue à investir dans le charbon et d’autres sources fossiles partout dans le monde. Et qui s’arc-boute sur la défense du nucléaire et la prolongation de la durée de vie de ses centrales vieillissantes, tout en s’opposant aux énergies renouvelables et aux économies d’énergie en France.

Ce sont quelques-unes des contradictions troublantes que l’Observatoire des multinationales met en lumière à travers son « rapport annuel alternatif » sur EDF.

C’est le troisième rapport de ce type publié par l’Observatoire, après celui sur Total paru fin mai et celui sur Engie, paru il y a une semaine. Un ultime rapport, sur Areva, sera publié le 9 juillet.

Quelques éléments clés détaillés par le rapport :

* En dix ans, les tarifs de l’électricité ont augmenté de 33% en France selon Eurostat. Selon le médiateur de l’énergie, les tarifs réglementés ont augmenté entre 49 et 56% en moyenne depuis 2007. Même constat en Grande-Bretagne, où EDF est l’un des principaux producteurs et distributeurs d’énergie, objet d’une enquête approfondie de l’Autorité de la concurrence.

* La question de la santé au travail et de la reconnaissance des maladies professionnelles, pour les salariés et encore plus pour les sous-traitants du nucléaire, reste un point noir du bilan social du groupe.

* En France, mais aussi en Grande-Bretagne et aux États-Unis, le parc de centrales nucléaires d’EDF est vieillissant et affecté par de nombreux problèmes de sûreté. EDF mise avant tout sur la prolongation de leur durée de vie, tandis que les projets de nouveaux réacteurs connaissent de nombreuses difficultés (Flamanville) ou paraissent incertains (Hinkley Point en Grande-Bretagne).

* Avec ses 16 centrales électriques au charbon dans le monde, EDF émet annuellement plus de carbone dans l’atmosphère que des pays comme l’Autriche et la Colombie. Si elle ferme ses centrales anciennes en France, elle a obtenu des dérogations aux directives européennes pour maintenir en activités des centrales au charbon extrêmement polluante en Pologne et aux Pays-Bas.

* À travers ses filiales Edison et EDF Trading, le groupe est engagé directement dans l’extraction pétrolière et gazière, y compris dans le gaz de schiste aux États-Unis.

* Seuls 0,1% de la production d’électricité du groupe en France est issu de sources renouvelables (hors barrages). À l’échelle mondiale, ce chiffre s’élève péniblement à 2%, mais plusieurs des projets « verts » d’EDF sont chaudement contestés par les populations locales (grands barrages en Amazonie, éoliennes au Mexique).

Pour lire le véritable bilan annuel d’EDF, c’est ici.

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