03.07.2018 • Répression

Ventes d’armes : un nouveau rapport dénonce la coopération des entreprises françaises avec le régime égyptien

Depuis son arrivée au pouvoir en Égypte en 2013, le général al-Sissi a installé un régime de répression sanglante et de surveillance généralisée. Un nouveau rapport de la Fédération internationale des droits humains (FIDH) dénonce la manière dont l’État français et plusieurs entreprises tricolores y participent en fournissant au régime d’al-Sissi du matériel militaire et de surveillance.

Publié le 3 juillet 2018 , par Rachel Knaebel

Depuis son coup d’État militaire en juillet 2013, le régime d’al-Sissi a mis en prison au moins 60 000 personnes pour des raisons politiques, dispersé des manifestations par des moyens militaires faisant des centaines de morts, sans compter les exécutions extra-judiciaires et les disparitions forcées (entre juillet 2013 et juin 2016, il y a eu en Égypte 2811 cas de disparitions forcées des mains des services de sécurité, indique la FIDH), et le recours systématique à la torture. Dans le même temps, entre 2010 et 2016, les livraisons d’armes françaises vers l’Égypte sont passées d’un volume de 39,6 millions d’euros à 1,3 milliard d’euros, rappelle la FIDH. « Certaines entreprises ont vendu des armes conventionnelles à une armée responsable de la mort de centaines de civils au nom de la guerre contre le terrorisme, notamment dans le Sinaï : navires de guerre Mistral (entreprise DCNS) ; frégates Fremm (DCNS) ; corvettes (Gowind) ; avions de combat Rafale ; véhicules blindés (Arquus) ; missiles air-air Mica et de croisière SCALP (MBDA) ; missiles air-sol 2ASM (SAGEM) », détaille le rapport (à lire ici).

D’autres entreprises françaises ont vendu des véhicules blindés (200 Renault Trucks vendus entre 2012 et 2014) et des machines-outils pour la fabrication de cartouches (Manurhin) aux services de police égyptien, « qui n’hésitent plus à disperser des manifestations au fusil mitrailleur », dit la FIDH. Des sociétés hexagonales ont aussi vendu aux services de sécurité égyptiens des technologies de surveillance (comme l’entreprise Amesys/Nexa), d’interception de masse (l’entreprise Ercom), de collecte des données individuelles (Idemia) et de contrôle des foules (les drones de Safran, le satellite d’Airbus/Thales, les blindés légers d’Arquus, ex-Renault Trucks Defense). « Ce faisant, elles ont toutes participé à la construction d’une architecture de surveillance généralisée et de contrôle des foules, visant à empêcher toute dissidence ou mouvement social, et ayant conduit à l’arrestation de dizaines de milliers d’opposants et militants », dénonce l’organisation de défense des droits humains.

La FIDH et ses organisations membres en Égypte et en France (Cairo Institute for Human Rights Studies, Ligue des Droits de l’Homme, Observatoire des Armements) demandent en conséquence aux entreprises et aux autorités françaises l’arrêt immédiat de ces exportations vers l’Égypte d’armements et de matériel de surveillance, la mise en place d’une enquête parlementaire sur les livraisons d’armes à l’Égypte depuis 2013, ainsi qu’une refonte totale du système français de contrôle des exportations d’armes et de matériel de surveillance, pour le rendre plus transparent. Seront-elles enfin entendues par les pouvoir publics, alors que les ventes d’armes françaises vers l’Arabie Saoudite, qui mène une guerre mortifère au Yémen, sont aussi montrées du doigt ?

Rachel Knaebel

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