03.11.2015 • COP21

Des « prix Pinocchio » pour dénoncer le rôle néfaste des multinationales face à la crise climatique

Cette année, COP21 oblige, les prix Pinocchio - le grand prix de l’irresponsabilité et de l’hypocrisie des multinationales, organisé depuis plusieurs années par les Amis de la terre - seront entièrement consacrés à l’enjeu climatique. Les entreprises nominées incluent plusieurs géants de l’énergie - EDF, Engie, Total, Shell et Chevron - mais aussi des représentants des secteurs agricole (Avril-Sofiprotéol, Yara), minier (Anglo American) et financier (BNP Paribas). Comme les années précédentes, Basta ! et l’Observatoire des multinationales sont partenaires médias des prix Pinocchio.

Publié le 3 novembre 2015 , par Olivier Petitjean

Dans un mois environ, Paris accueillera la COP21 - autrement dit la 21e Conférence internationale sur le climat, une échéance cruciale pour empêcher, pendant qu’il est encore temps, les conséquences les plus catastrophique du changement climatique. Ces dernières années, à mesure que les conférences intergouvernementales se succédaient et que les espoirs s’amenuisaient d’atteindre un jour un accord ambitieux et contraignant de réduction drastique des émissions globales de gaz à effet de serre, les multinationales ont pris une place de plus importante et de plus contestée dans le processus des COP. La Conférence climat de Paris ne fera pas exception (lire nos articles ici, ici et ).

Les prix Pinocchio, organisés par les Amis de la terre et plusieurs partenaires, cherchent précisément à dénoncer l’influence néfaste et les faux discours des multinationales. Cette année, à l’occasion de la COP21, ces prix seront spécialement consacrés à l’enjeu climatique, avec une dimension beaucoup plus internationale. Neuf entreprises sont nominées dans trois catégories – Lobbying, Greenwashing et Impacts locaux - et seront départagées par les suffrages des internautes. Les votes sont ouverts à partir d’aujourd’hui et jusqu’au 2 décembre sur le site des prix Pinocchio.

Les trois entreprises nominées dans la catégorie « Lobbying » sont Avril-Sofiprotéol, Chevron et Total. Le géant français de l’agrobusiness, dirigé par le président de la FNSEA Xavier Beulin, est dénoncé pour ses investissements dans les agrocarburants et son lobbying agressif, en France et au niveau européen, pour empêcher toute remise en cause de la manne financière qu’elle tire de cette forme d’énergie, désormais largement discréditée. Chevron est mise en cause pour la manière dont elle a imposé le gaz de schiste à l’Argentine en extorquant aux autorités de ce pays des conditions extrêmement favorables. En ce qui concerne Total, enfin, ce sont ses efforts pour promouvoir le gaz comme une énergie « propre » et comme une « solution » à la crise climatique, y compris en prenant le contrôle des lobbies européens du solaire et du renouvelable, qui lui attirent les foudres des Amis de la terre et de leurs alliés.

Les entreprises sponsors de la COP21 en ligne de mire

La catégorie « Greenwashing » accorde une large place aux entreprises sponsors de la COP21, puisqu’y figurent aussi bien Engie qu’EDF. La première est épinglée pour ses investissements massifs dans le charbon et les autres énergies fossiles (comme le gaz de schiste), qu’elle tente actuellement de cacher sous un vernis « vert » en proclamant sa conversion à la cause de la transition énergétique et des renouvelables. EDF, quant à elle, se voit reprocher ses campagnes publicitaires vantant, de manière trompeuse, l’énergie nucléaire comme une source d’électricité « sans CO2 ». Dernière nominée dans cette catégorie, l’entreprise norvégienne Yara, leader mondial des engrais synthétiques, qui cherche aujourd’hui à redonner une légitimité à cette source majeure de gaz à effet de serre (protoxyde d’axote et dioxyde de carbone) à travers la notion d’« agriculture climato-intelligente ».

Enfin, la catégorie « Impacts locaux » cible BNP Paribas – un autre sponsor officiel de la COP21 – aux côtés de Shell et de la firme minière Anglo American. La banque française est mise en cause pour son rôle éminent dans le financement du secteur du charbon au niveau mondial. Le vingtième anniversaire de l’exécution du poète et militant nigérian Ken Saro-Wiwa est l’occasion de mettre une nouvelle fois en lumière l’impact social et environnemental dramatique des activités de Shell et des autres multinationales pétrolières dans le delta du Niger. Anglo American, pour sa part, est dénoncée pour sa mine à ciel ouvert géante de charbon en Colombie, El Cerrejón.

Comme les années précédentes, Basta ! et l’Observatoire des multinationales sont partenaires média des prix Pinocchio [1] aux côtés de Radio Mundo Real – la station radio des Amis de la terre international. Tout au long du mois de novembre, nous présenterons plus en détail les entreprises nominées et ce qui leur est reproché par les militants du climat.

Les prix Pinocchio sont organisés par les Amis de la terre France avec Peuples Solidaires et le programme « Une seule planète » du CRID – avec en outre cette année Les Amis de la terre Europe et le Corporate Europe Observatory (CEO). La cérémonie de remise de ces prix de l’hypocrisie climatique aura lieu le 3 au soir à Paris, en pleine Conférence climat (inscription ici).

Olivier Petitjean

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Notes

[1Cette année, l’association Alter-médias, qui publie Basta ! et l’Observatoire des multinationales, a également contribué à la mise en place du site web des prix Pinocchio dans le cadre d’une prestation de service.

Les enquêtes de l’Observatoire

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    Les lois sur le secret des affaires, adoptées à l’instigation des lobbies économiques, constituent un nouveau recul pour le droit à l’information.

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    Lobby Planet Paris : cartographie d’une COP21 sous influence

    Effets d’annonce, fausses solutions, "greenwashing" et rôle actif des multinationales dans les discussions. La Conférence Climat de Paris a aussi été un grand moment de lobbying.

  • Opportunisme

    Lobbying : l’épidémie cachée

    Derrière l’épidémie du coronavirus, il y en a aussi une autre, moins visible : une épidémie de lobbying. Les industriels n’ont pas perdu de temps pour « ne pas laisser se gâcher une bonne crise ».

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