07.03.2014 • Transfert de richesse ?

États-Unis : comment les multinationales accumulent des millions de dollars d’aides publiques

Aux États-Unis, municipalités et États distribuent des millions de dollars d’aides publiques directes et indirectes (subventions, crédits d’impôts, etc.) au titre du « développement économique local ». L’organisation civique américaine Good Jobs First se consacre au suivi et à l’évaluation critique de ces aides. Avec un double constat : non seulement ces subventions directes et indirectes sont massives, et disproportionnées eu égard aux bénéfices socio-économiques concrets qui en sont attendus, mais en outre, elles sont accaparées par les grands groupes, via une multitude de filiales, au détriment des petites entreprises locales.

Publié le 7 mars 2014 , par Olivier Petitjean

Good Jobs First a déjà publié par le passé plusieurs rapports critiques sur la question des aides publiques aux entreprises, concluant généralement au peu d’efficacité de ces aides d’un point de vue économique et social. Une étude récente mettait ainsi en évidence la disproportion flagrante entre le montant global des subventions accordées et le faible nombre d’emplois en jeu : Good Jobs First calculait ainsi qu’un seul emploi coûte en moyenne 456 000 dollars d’aids publiques ! (Lire États-Unis : $456,000 dollars de subvention en moyenne pour créer un emploi)

Grâce à un nouveau développement de sa base de données des aides publiques directes et indirectes octroyées par les collectivités locales américaines au secteur privé, le Subsidy Tracker (« Traceur de subventions »), Good Jobs First est désormais en mesure d’identifier, parmi les bénéficiaires des aides, les filiales des grands groupes américains ou étrangers.

Un exercice qui permet de confirmer que ce sont les grandes entreprises et les multinationales, et non les PME, qui sont les principales bénéficiaires des largesses des politiciens locaux, s’accaparant environ les trois quarts des aides publiques recensées depuis 2008. L’étude suggère également que le fait de se cacher derrière un grand nombre de filiales permet à certaines maisons mères d’accumuler davantage d’aides publiques.

L’ensemble des informations est disponible sur le site de Good Jobs First : Subsidizing the Corporate One Percent.

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Le classement est dominé par Boeing, qui accumule plus de 13 milliards de dollars d’aides publiques directes et indirectes depuis 2008, à travers pas moins de 137 filiales différentes. De manière générale, dès lors que ces aides sont souvent liées au souci de la création ou de la préservation d’emplois, le secteur industriel se taille la part du lion : les places suivantes du classement sont occupées par Alcoa, Ford, General Motors ou encore Intel, Fiat et Shell.

On trouve toutefois aussi dans le peloton de tête des firmes technologiques, voire des institutions financières comme Berkshire Hathaway (firme de Warren Buffett), Goldman Sachs et JP Morgan, ainsi qu’une firme de services de santé, Cerner (10e du classement avec plus de 1,7 milliard de dollars d’aides publiques).

Et on y trouve également, enfin, quelques groupes français, comme ArcelorMittal (13e, 1,34 milliard de dollars, 58 filiales [1]), Michelin (50e, 357 millions d’aides, 46 filiales) ou encore Areva (66e, avec 290 millions d’aides réparties entre 13 filiales, principalement pour un projet en suspens d’usine de traitement d’uranium dans l’Idaho).

Rappelons qu’il ne s’agit là que des aides aux entreprises émanant de sources locales (municipalités et États), auxquelles doivent s’ajouter les contrats fédéraux...

Olivier Petitjean

— 
Image : TruthOut.org CC

Notes

[1Principalement grâce à des aides publiques de plus d’un milliard de dollars pour une usine dans l’Alabama.

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