02.03.2015 • Responsabilité des sociétés mères

Plans sociaux : comment la loi Macron facilite les « faillites organisées »

C’est un aspect peu abordé de la loi Macron « pour la croissance et l’activité », qui vient d’être adoptée au forceps à l’Assemblée nationale : les plans de sauvegarde de l’emploi présentés par des entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire n’auront plus à être proportionnés aux moyens financiers du groupe dans son entier, mais seulement de la filiale concernée. Pour de nombreux observateurs, cette déresponsabilisation des sociétés mères revient à ouvrir la porte grande ouverte aux faillites organisées, visant à se débarrasser d’établissements peu rentables.

Publié le 2 mars 2015

Le Monde explique en détail les enjeux de la nouvelle disposition de la loi Macron :

Le problème que pose l’article 101 de la loi est plus crucial encore quand la faillite de la filiale a été organisée par sa maison-mère pour s’en débarrasser, par exemple en asséchant les commandes qu’elle lui passait. Des cas qui ne sont pas rares.

Grâce à cet article 101, « les grands groupes vont pouvoir liquider leur filiale sans endosser le minimum de responsabilité, dénonce l’avocat de salariés Roger Koskas, du cabinet Grumbach. C’est une immunité qui leur est donnée, un aval pour se réorganiser sur le dos de la collectivité et au détriment des salariés. » (...)

« On ne cesse aujourd’hui de dénoncer les faillites organisées par les groupes, abonde Pascal Lokiec, professeur de droit à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense et auteur du livre « Il faut sauver le droit du travail ! » (éditions Odile Jacob, janvier 2015). On avait, avec cette loi, l’occasion de se donner les moyens juridiques d’obliger le groupe à contribuer au plan social. On a fait l’inverse. On a loupé le coche. Avec, derrière, l’idée que le droit social serait un frein à l’embauche et un handicap à l’investissement. »

Lire l’intégralité de l’article sur le site du Monde.

Le précédent de l’affaire Elba

Mediapart, qui a aussi consacré un article aux enjeux de cet article 101, revient sur le précédent que constitue l’affaire Elba :

« Sous prétexte de libérer l’activité, la loi Macron fait sauter de multiples verrous », renchérit André Chassaigne. Le chef de file des députés du Front de gauche a dans le viseur cet article 101 en particulier : « Il va permettre d’exonérer les maisons-mères et les holdings de leur implication dans les PSE (plans de sauvegarde de l’emploi – ndlr). C’est une véritable honte. Après avoir aspiré les richesses d’un site de production – remontée des profits, transferts de production en les délocalisant, assèchement des commandes, facturation grossie de tâches administratives recentralisées vers la maison-mère, etc. –, on fait un plan de redressement avec un PSE lamentable sur les seuls fonds de la filiale, voire on ferme tout de suite par liquidation. »

André Chassaigne va même jusqu’à se demander si ce n’est pas le précédent Elba qui motive cet article. Elba, une affaire qu’il connaît bien et à propos de laquelle il interpelle très régulièrement le gouvernement. Elle se déroule sur sa circonscription en Auvergne à La Monnerie-le-Montel dans le bassin de Thiers sinistré par le chômage. C’est l’un des premiers plans sociaux réalisés au lendemain de l’entrée en vigueur de la loi transposant l’ANI, en juillet 2013 : 64 salariés d’une papeterie mis sur le carreau du jour au lendemain à la veille des congés d’été (lire ici notre reportage).

Le groupe Hamelin, la maison-mère, qui dégage des millions de bénéfices et reçoit pléthore d’aides publiques comme le CICE, un des premiers cadeaux de la gauche au patronat, n’a pas supporté de passer à la caisse avec le PSE validé en janvier 2014 par la Dirrecte après un accord majoritaire avec les syndicats. Sa pirouette pour s’exonérer de ses responsabilités et ne pas avoir à prendre en charge l’accord signé avec les syndicats (formations, prime supra-légale, différentiel de salaire, etc.) relève du patron voyou : il a ni plus ni moins détourné la procédure en organisant la cessation de paiement de sa filiale, privant les salariés d’indemnités comme de reclassement, les renvoyant vers le fonds AGS (fonds de garantie des salaires) !

Lire l’intégralité de l’article sur le site de Mediapart (abonnement).

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Photo : Jeanne Menjoulet cc

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