21.11.2022 • Droit international

Pour s’implanter en Israël, Carrefour ignore le droit international

Dans un rapport publié le 16 novembre, sept ONG et syndicats dénoncent un accord passé par le groupe Carrefour avec des sociétés israéliennes impliquées dans la colonisation illégale des territoires palestiniens.

Publié le 21 novembre 2022 , par Chiara Pignatelli

L’Association France Palestine Solidarité, Al-Haq, la Confédération générale du travail (CGT), la Fédération commerces et services de la CGT, la Ligue des droits de l’Homme, la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine et l’Union syndicale Solidaires dénoncent dans un nouveau rapport « les liaisons dangereuses du groupe Carrefour avec la colonisation israélienne ». Pour les auteurs, en signant un accord avec la société Electra Consumer et sa filiale Yenot Bitan en vue de s’implanter en Israël d’ici la fin de l’année, le géant français de la grande distribution a en effet choisi de s’impliquer directement dans la colonisation illégale des territoires palestiniens. Au moins trois magasins Yenot Bitan sont implantés dans des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés, comme Ariel et Ma’aleh Adumin en Cisjordanie. Les deux sociétés israéliennes figurent dans la liste des entreprises impliquées dans la colonisation élaborée par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (voir L’ONU interpelle les entreprises impliquées dans les colonies israéliennes illégales). Une liste où aparaissent également deux entreprises françaises, Alstom et Egis Rail pour leur implication dans le tramway de Jérusalem (lire Trois entreprises françaises participent à la politique israélienne d’annexion de Jérusalem).

L’accord signé le 6 mars 2022 entre Carrefour et ses partenaires israéliens est un contrat de franchise internationale qui prévoit la conversion progressive de plus de 150 magasins de la filiale Yenot Bitan en enseignes Carrefour, l’ouverture pour le groupe français de ses propres magasins et la commercialisation de ses produits de marque dans tout le pays. Carrefour tirera ainsi profit de la colonisation par les services qu’il fournira aux magasins franchisés et par la vente de ses produits. Ce faisant, soulignent les associations et les syndicats derrère le rapport, le groupe français contribuera aussi à la prospérité et au développement économique de ces colonies illégales à travers la création d’emplois, de services et des moyens de financement.

La France condamne, les entreprises françaises font des affaires

La France a condamné officiellement à plusieurs reprises l’implantation de colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, qui sont illégales du point de vue du droit international. Le rapport rappelle que la responsabilité des entreprises opérant dans des zones de conflits ou occupées est elle aussi engagée. Elles doivent faire preuve d’une diligence accrue en matière de droits humains, notamment au titre du devoir de vigilance prévu par le droit français qui recouvre également les activités de leurs fournisseurs et partenaires commerciaux.

Les associations demandent à Carrefour de se conformer au droit international en mettant fin à son accord avec la société Electra Consumer Products et sa filiale Yenot Bitan. Elles enjoignent également l’Etat français à décourager toute participation d’entreprises françaises à la colonisation israélienne et à rappeler au groupe Carrefour ses obligations et les risques juridiques de ce partenariat. En 2016, soumis à une pression similaire, Orange avait mis fin à son partenariat avec l’entreprise israélienne de télécoms Partner Communications (lire Douteuses « relations d’affaires » pour Orange dans les colonies israéliennes illégales. De même Axa quelques années plus tard (voir Axa se désinvestit d’une entreprise d’armement israélienne, cible d’une campagne de boycott). Mais plusieurs champions tricolores continuent à entretenir des liens directs ou indirects avec des entreprises israéliennes aux activités problématiques, notamment dans le secteur financier (lire Ces banques et sociétés d’assurances françaises qui financent l’expansion coloniale israélienne).

Chiara Pignatelli

 
Photo : Lisa Nessan cc

Les enquêtes de l’Observatoire

L’Observatoire est à votre écoute

  • Besoin d’éclaircissements ?
  • Une question ?
  • Une information à partager ?
Contactez-nous