Le titan de la gestion d’actifs BlackRock est de nouveau critiqué pour ses tentatives d’influencer les plans de l’Union européenne en matière de climat, dans un nouveau rapport de Reclaim Finance et de l’Observatoire des multinationales. Le rapport, publié aujourd’hui, décrit une « toile de lobbying » déployée par BlackRock « dans le but d’empêcher une réglementation forte », et paraît peu avant la publication par BlackRock de son rapport controversé sur le changement des règles bancaires pour la Commission européenne [1].
Cette nouvelle enquête met en lumière le rôle invisible de BlackRock au cœur d’une formidable machine de lobbying. L’analyse montre comment BlackRock a joué un rôle de premier plan dans un réseau d’au moins 23 associations professionnelles et think tanks. Au total, ces groupes ont dépensé environ 30 millions d’euros par an en lobbying auprès des institutions européennes, menant l’opposition à une « taxonomie des activités polluantes » [2] et plaidant pour une régulation basée sur des mécanismes volontaires.
Le rapport soulève plus généralement des questions sur l’influence de BlackRock sur la stratégie tant attendue de l’UE en matière de finance durable, qui doit elle-même être publiée la semaine prochaine [3].
Lara Cuvelier, chargée de campagne investissements durables à Reclaim Finance, a déclaré : « Notre rapport révèle que la Commission européenne a laissé l’un des lobbys les plus puissants prendre le contrôle de ses plans sur la finance verte. BlackRock se trouve au cœur d’un réseau d’associations professionnelles, de groupes de pression et de réunions en coulisses qui n’ont qu’un seul but : s’assurer que les réglementations qui touchent le secteur financier en matière de climat soient les plus souples possibles. »
Olivier Petitjean, de l’Observatoire des multinationales, a déclaré : « L’offensive de lobbying de BlackRock porte déjà ses fruits, puisqu’elle a réussi à édulcorer la réglementation liée à la finance climat, en faisant par exemple pression pour que les standards européens d’obligations vertes restent volontaires. BlackRock a certainement mis le pied dans la porte, puisqu’il a signé neuf contrats avec les institutions de l’UE depuis 2016, mais le contrat sur les banques représente un nouveau degré d’influence, puisqu’il est désormais explicitement chargé de contribuer à la conception de la réglementation européenne. »
Le rapport montre également les liens que BlackRock a tissés avec des fonctionnaires de l’UE et des organes affiliés. Il détaille 24 réunions avec la Commission européenne liées à la finance durable et le recrutement d’anciens fonctionnaires de l’UE et du FMI à des postes de direction.
Enfin, les auteurs soulignent le rôle de BlackRock dans de multiples groupes d’experts ou de travail organisés par la Commission, y compris des groupes donnant des conseils sur les questions de finance climat [4].
La motivation de BlackRock à résister à une régulation plus forte, selon les auteurs, réside en partie dans ses intérêts dans le secteur des énergies fossiles [5], qui seraient à l’origine de son approche « 50 nuances de vert ».
Lara Cuvelier conclut : « Larry Fink n’est pas soudainement devenu un fervent défenseur de la cause climatique ; au contraire, BlackRock a fait des heures supplémentaires pour s’assurer que l’UE n’adopte pas de réglementation qui porterait atteinte à ses intérêts, surtout en lien avec l’industrie des énergies fossiles. Alors qu’elle s’apprête à publier le renouvellement de sa stratégie finance durable, la Commission doit maintenir une stratégie climatique ambitieuse et fondée sur la science, et non écrite par les lobbyistes. »
– Lire le rapport (en anglais) : Hijacked : Exposing BlackRock’s Grip on the EU’s Climate Finance Plans
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