Dans les trois principales capitales où elles doivent théoriquement publier des chiffres sur leurs dépenses de lobbying, les entreprises du CAC40 ont dépensé collectivement 66 millions d’euros en 2018. Les plus gros lobbyistes du CAC40 sont Sanofi (et de loin, avec près de 10 millions d’euros de dépenses à elle seule), Total (5,2 millions d’euros dans les trois capitales) et Airbus (5 millions).
Ces dépenses sont à la fois défensives (empêcher des régulations trop contraignantes sur les émissions de gaz à effet de serre ou sur le prix des médicaments, par exemple) ou offensives (obtenir des marchés publics ou des aides). Ces chiffres illustrent l’importance pour ces multinationales de soigner leurs relations avec les États et les décideurs.
Les trois leaders sont suivis par Engie, ArcelorMittal et le Crédit agricole, toutes entre 3 et 4 millions. Les firmes du CAC qui font (ou déclarent) le moins de lobbying sont Legrand, Dassault Systèmes et Atos.
À Paris, présence en force de Total et des banques
L’entreprise du CAC40 qui déclare le plus de dépenses de lobbying est le groupe pétrolier Total, avec 2,6 millions d’euros de dépenses déclarées. Cette position reflète le rôle important de l’État français dans la régulation et le soutien au secteur énergétique, et la diversité des activités dans lesquels le groupe pétrolier est engagé en France (gaz, raffinage et pétrochimie, solaire, et désormais fourniture d’énergie et agrocarburants). On remarque aussi le poids du lobbying du secteur bancaire (BNP Paribas, Crédit agricole et Société générale), lui aussi très dépendant des régulations mises en place au niveau national, et exposé aux conséquences du Brexit.
À Bruxelles, les enjeux énergétiques et climatiques au premier plan
La capitale européenne est réputée être un paradis pour les lobbys. C’est aussi un lieu important d’éla- boration des normes qui conditionnent l’accès au marché européen, et au-delà. Ce qui explique que ce soit le lieu de décision le plus investi par les firmes du CAC40, avec des dépenses de lobbying de 25,4 millions d’euros en 2018. En tête des plus gros dépensiers, on retrouve les poids lourds du secteur énergétique, Total et Engie, soucieux des règles que pourrait mettre en place l’Union pour lutter contre le réchauffement climatique. C’est en partie le même souci qui anime le lobbying des deux suivants au classement, Airbus et ArcelorMittal, qui représentent deux secteurs industriels très émetteurs de gaz à effet de serre.
À Washington, Sanofi et Airbus loin devant
Les dépenses de lobbying du CAC40 à Washington sont largement fonction de l’importance dumarché nord-américain pour les firmes concernées. D’où le poids considérable de Sanofi, qui surfe sur le prix élevé des médicaments dans le pays et veut à tout prix éviter des mesures correctives, et d’Airbus, confronté à la concurrence permanente de Boeing. Ils sont suivis par des firmes plus préoccupées de question de propriété intellectuelle et de protection des marques, comme Pernod Ricard et Vivendi.
L’influence politique des entreprises aux États- Unis passe aussi par le financement des campagnes électorales et, comme à chaque fois, des groupes du CAC40 ont déboursé des fonds conséquents – près de 3 millions de dollars au total – dans le cadre de la campagne 2018 des « midterms ». Sentant sans doute le vent tour- ner, certaines firmes comme Sanofi ou Axa, qui penchaient auparavant pour les Républicains, ont rééquilibré leurs financements, tandis que d’autres confirmaient leur attachement historique pour le camp républicain (Airbus et Air liquide) ou démocrate (Vivendi).
Olivier Petitjean
Infographies : Guillaume Seyral
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Photo : CC Charles Sayger via flickr
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