Le principal bénéficiaire des dividendes versés au titre de 2019 par le CAC40 est le groupe familial Arnault avec 1,16 milliard d’euros, principalement issus du dividende de LVMH (et dans une moindre mesure de Carrefour). Immédiatement derrière vient le fonds d’investissement BlackRock (1,155 milliard), présent au capital de virtuellement tous les groupes du CAC, et notamment des gros distributeurs que sont Total et Sanofi. En troisième position, l’État français touche directement et indirectement (via la Caisse des dépôts et consignations) 726 millions d’euros de dividendes au titre de l’exercice 2019. Juste derrière, la famille Bettencourt (L’Oréal) empoche 723 millions d’euros.
Ces chiffres montrent que les grands actionnaires de l’indice parisien ont été très diversement affectés par la baisse des dividendes liées à l’épidémie de Covid-19. Si l’on considère les dividendes initialement prévus, l’État français devait toucher plus de 2 milliards d’euros, dont 1,5 milliard directement et 536 millions via la Caisse des dépôts. C’est lui qui a subi la baisse la plus drastique, avec des dividendes réduits des deux tiers globalement. Rappelons que le gouvernement avait demandé « aux entreprises dont il est actionnaire de ne pas verser de dividendes par solidarité ».
Cette baisse est néanmoins très contrastée entre les différentes branches de l’État actionnaire. Les participations directes, via l’Agence des participations de l’État (groupes énergétiques ou d’armement : Engie, Safran, Thales) sont réduites à presque rien. Les participations détenues via Bpifrance (Renault, PSA, Orange) sont amputées de 44%. C’est là que les injonctions de l’État actionnaire à suspendre les dividendes n’ont pas été obéies : Orange, ST Micro. Enfin, les participations de la Caisse des dépôts et consignations ne baissent que de 30%. Par comparaison, BlackRock a vu ses dividendes diminués de 40% et la famille Arnault de 30%.
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Quant à la famille Bettencourt, ses dividendes ont été réduits de seulement 8%, et ceux de la famille Hermès de 9%. Ce qui illustre le caractère très symbolique des « réductions » de dividendes annoncées par les firmes concernés. Tout aussi bien loti : le fonds d’investissement Massachusetts Financial Services (MFS). Présent au capital de firmes qui ont maintenu ou seulement modestement réduit leur dividende (Danone, Dassault Systèmes, Legrand et Pernod Ricard), il voit ses dividendes amputés de... 1,6%. À l’extrême opposé, l’État belge (actionnaire de BNP Paribas) et Delfin (la société de Leonardo del Vecchio, actionnaire d’EssilorLuxottica) voient leurs dividendes réduits à rien.
Le palmarès risque fort d’être encore le même l’année prochaine. LBMH a d’ores et déjà annoncé un acompte sur dividende de 2€ par actions, versé en décembre 2020, soit plus d’un milliard d’euros. De même pour Orange, l’un des principaux pourvoyeurs de dividendes de l’État actionnaire, qui a lui aussi annoncé un acompte d’un milliard d’euros avant la fin de l’année.
Ces chiffres sont basés sur les informations publiques relatives à l’actionnariat du CAC40. Ces données ne sont rendues publiques qu’à partir de certains seuils de détention, généralement 5% du capital. Des fonds d’investissement comme BlackRock (ou des institutions financières publiques comme la Caisse des dépôts) possèdent généralement des faibles pourcentages de chaque firme, qui n’apparaissent pas forcément dans les données publiques, et qui changent constamment. Pour ce type d’actionnaires (au contraire des grands actionnaires que sont les fondateurs ou l’État), les montants donnés ne sont donc que des approximations, probablement sous-estimées.
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Photo : Jérémy Barande, CC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons
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