Les données que nous rendons publiques avec ce deuxième volet des Pharma Papers montrent que les dépenses de médicament de l’assurance maladie ont largement augmenté au cours des dix dernières années, malgré une baisse conséquente des niveaux de remboursements entre 2011 et 2016. En 2017, ces dépenses atteignent environ 25 milliards d’euros. Un petit nombre de traitements dits « innovants », au prix de plus en plus exorbitant, particulièrement dans le domaine du cancer, contribue à maintenir une pression financière sur la sécurité sociale.
Les remboursements de médicaments que nous avons pu analysés ont globalement augmenté de 29% depuis 2010. Mais les remboursements de la liste dite « en sus », qui concerne les molécules les plus onéreuses prescrites dans les hôpitaux, ont explosé de 239% depuis 2005. Les plans d’économie et les déremboursements de médicaments régulièrement annoncés par les gouvernements successifs ne font ainsi que libérer des fonds pour les exigences de plus en plus pharaoniques des labos.
L’anti-cancéreux Opdivo, du laboratoire Bristol Myers Squibb, fait ainsi son entrée dans le top 10 des médicaments les plus remboursés en 2017 avec 314 millions d’euros à charge de l’assurance maladie. Le coût d’une seule perfusion : 413 euros, soit entre 60 000 et 72 000 euros par an et par patient.
Le discours des laboratoires est bien rodé : le secteur pharmaceutique serait le premier touché par les économies visant à équilibrer le budget de la sécu, et les déremboursements nuiraient à sa compétitivité. Ils continuent pourtant à afficher des bénéfices records, parce que les médicaments déremboursés laissent à la place à de nouveaux traitements beaucoup plus lucratifs. Dans le même temps, les labos obtiennent des pouvoirs publics un assouplissement des règles de mises sur le marché et une accélération des procédures.
Cette évolution est une menace directe pour la pérennité de la sécurité sociale et ses valeurs d’égalité et de droit aux soins. Elle semble d’ores et déjà entraîner des restrictions de prescriptions et des hiérarchisations.
La maîtrise de ces dépenses ne pourra être assurée sans remettre en cause la manière opaque et déséquilibrée dont sont actuellement fixés le prix et le taux de remboursement des médicaments, ainsi que les logiques financières du secteur pharmaceutique.
Le site des « Pharma Papers » : https://www.bastamag.net/webdocs/pharmapapers/
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* Avec les « Pharma Papers », Basta ! et l’Observatoire des multinationales mettent en lumière, à travers des enquêtes et des reportages, et la mise en lumière de données et de chiffres jusqu’ici peu accessibles, les confortables profits engrangés par les laboratoires pharmaceutiques sur le dos des systèmes de sécurité sociale, et les énormes moyens d’influence déployés pour préserver ces profits.
* Nous publions aujourd’hui le second volet de cette série, consacré aux remboursements de médicaments par la sécurité sociale en 2017. Les chiffres que nous révélons incluent la liste des médicaments qui coûtent le plus à la sécurité sociale, les médicaments les plus onéreux, et les laboratoires pharmaceutiques qui bénéficient le plus des remboursements.
* Le premier volet, disponible en ligne, portait sur les cadeaux et autres rémunérations des labos aux médecins, ainsi que sur leurs dépenses de lobbying.