16.09.2013 • Communication

Veolia quitte Berlin : « plan d’économies » ou remunicipalisation ?

Le géant français de l’eau a annoncé publiquement avoir trouvé un terrain d’entente avec les autorités berlinoises pour leur revendre ses parts dans le service de l’eau de la capitale allemande. Un accord présenté par Veolia et par la presse française comme une contribution au « plan d’économies » du groupe, mais qui cache bel et bien une remunicipalisation du service de l’eau, obtenue de haute lutte par les citoyens berlinois.

Publié le 16 septembre 2013 , par Olivier Petitjean

Le contrat initial, signé en 1999, représentait le plus important partenariat public privé (PPP) de l’histoire, en Allemagne. Il avait été conclu dans des conditions particulièrement opaques : Veolia était associée à l’entreprise énergétique allemande RWE et, au départ, à l’assureur Allianz. À l’origine, la teneur du contrat était maintenue secrète, sans doute parce qu’il offrait des conditions particulièrement favorables aux partenaires privés en termes de profits garantis.

Face à l’augmentation des prix, les citoyens berlinois ont organisé un référendum populaire, en 2011 (une possibilité prévue par la constitution berlinoise), malgré l’opposition acharnée des gouvernants de la ville. 660 000 Berlinois, soit plus d’un quart de l’électorat, ont pris part à ce vote, se prononçant massivement pour la divulgation des contrats et le retour sous régie publique. Commission européenne et Commission allemande de la concurrence s’en sont également mêlées. Cette dernière a estimé que le contrat signé avec Veolia violait la loi allemande, et a imposé une baisse de 18% du prix de l’eau.

La ville-État de Berlin – aujourd’hui à nouveau gouvernée par une « grande coalition » entre socio-démocrates et conservateurs – a finalement cédé à la pression. Elle a décidé de remunicipaliser le service, à l’image de la capitale française et de nombreuses villes européennes. C’est RWE qui a fait le premier pas, en 2012, en revendant ses 25% de parts dans le service de l’eau berlinois, malgré les pressions et recours judiciaire de Veolia.

L’entreprise française va finalement vendre ses 25% de parts restantes dans Berlinwasser pour 590 millions d’euros. A cela s’ajoutent 54 millions supplémentaires liés à des opérations financières diverses. Le groupe omet toutefois de préciser qu’il s’est battu bec et ongle contre la remunicipalisation. Il présente désormais cette opération comme une contribution à son repositionnement stratégique et au « plan d’économies » global qu’il a lancé pour éponger sa dette – une version largement reprise par la presse française.

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Porte-parole des opposants à la privatisation, la Berliner Wassertisch ou « Table-ronde berlinoise de l’eau » s’est félicitée du départ définitif de Veolia, mais estime que la somme consentie à la firme française est trop importante. Les militants craignent qu’elle pèse sur la gestion du service pendant de nombreuses années. Cela empêcherait notamment une future baisse du prix de l’eau, ce qui s’est produit à Paris, suite à la remunicipalisation. Les militants estiment que Veolia et RWE ont déjà engrangé suffisamment de profits, depuis 1999, grâce à la hausse des prix et à la réduction drastique des effectifs, des travaux de maintenance et des investissements effectués.

L’Allemagne connaît depuis quelques années un vigoureux mouvement de remunicipalisation des services publics. Le 3 novembre prochain, les Berlinois se prononceront dans le cadre d’un nouveau référendum populaire sur le retour en régie publique de leur réseau de distribution d’électricité.

La « Table-ronde berlinoise de l’eau » ne compte d’ailleurs pas en rester là. « Maintenant, nous devons contrôler et pousser vers l’avant nos politiciens », déclare Dorothea Härlin, membre fondatrice de la Table-ronde. « Nous devons les empêcher de poursuivre la gestion de l’eau orientée vers les profits qui a si longtemps prévalu ici. C’est pourquoi la Table berlinoise de l’eau a déjà publié l’ébauche d’une ‘Charte berlinoise de l’eau’ comme instrument participatif de démocratie directe, en vue d’une gestion démocratique, transparente, écologique et sociale de l’eau à Berlin. »

OP


Photo : campact, cc

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