10.06.2016 • Hypocrisie ?

Total, principal acheteur du pétrole extrait en Arctique

Total est l’une des seules majors pétrolières à avoir déclaré qu’elle n’exploiterait jamais de pétrole offshore dans l’Arctique, en raison des risques environnementaux. Mais ces beaux discours cachent une réalité tout autre : Total est le principal client du pétrole arctique russe, qui arrive notamment dans sa raffinerie du Havre.

Publié le 10 juin 2016 , par Olivier Petitjean

Alors que les multinationales pétrolières, à l’image de Shell, ont suspendu la plupart de leurs projets offshore en Arctique au large du Canada et de l’Alaska, l’extraction de pétrole bat son plein dans l’Arctique russe. La production de pétrole arctique - notamment dans le gisement de Prirazlomnoye de Gazprom - devrait atteindre cette année plus de 2 millions de tonnes. Selon des révélations de l’EnergyDesk de Greenpeace, une partie significative de ce pétrole se dirige vers Europe, et notamment en France, par le biais de Total. Le géant pétrolier français est, à travers sa filiale de trading Totsa, le principal acheteur du pétrole de Prirazlomnoye.

Cette situation est d’autant plus paradoxale que Total s’est engagée, à partir de 2012, à ne pas extraire de pétrole dans la région Arctique (ce qui ne l’empêche pas d’y exploiter du gaz, avec des risques environnementaux tout aussi sérieux, mais moins visibles).

Au début de l’année, Total et Gazprom ont même signé une extension de leur contrat d’approvisionnement de long terme, aux termes duquel Totsa recevra cette année entre 8 et 12 cargos de brut arctique - plusieurs centaines de milliers de tonnes de pétrole. Selon Greenpeace, celui-ci est traité dans les raffineries de Total au Havre et à Rotterdam, et une partie sera revenue à ExxonMobil (qui possède également une raffinerie au Havre via sa filiale Esso).

En réponse à EnergyDesk, Total a confirmé ces livraisons, en précisant qu’elle restait toujours engagée à ne pas prospecter ou extraire de pétrole « dans la banquise arctique ». Une formulation étrange, dans la mesure où auparavant le géant français s’était engagé à ne pas forer dans la région arctique en général, et où la proportion de l’océan Arctique recouverte par les glaces ne cesse de s’amoindrir.

Jamais elle n’a été aussi basse que ce printemps, et certains craignent même que l’océan Arctique soit complètement ouvert et libre de glaces dès la fin de l’été 2016, alors que ce n’était pas attendu avant 2030.

Olivier Petitjean

 Lire notre enquête sur l’Arctique et ses ressources : Entre réchauffement et projets industriels, l’Arctique en mutation forcée et Ruée sur les ressources du Grand Nord

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Photo : Gazprom

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