27.11.2015 • Cancers professionnels

France : des ouvriers exposés au cadmium poursuivent le groupe Saft

Le groupe français Saft est le leader mondial des batteries haute technologie. Soixante-dix ouvriers de son usine de Nersac, près d’Angoulême, poursuivent leurs dirigeants pour « mise en danger de la vie d’autrui », après avoir été exposés au cadmium pendant des années. Reportage de Mediapart.

Publié le 27 novembre 2015

Marie-Thérèse ne parvient pas « à remonter la pente ». « Peut-être que je n’y arriverai qu’une fois sous terre », dit-elle, la voix noyée par les larmes. Elle refuse « les médicaments et le psy pour aller mieux », « ne pense qu’à lui » : Bernard Leveque, son mari, emporté par un cancer broncho-pulmonaire, reconnu maladie professionnelle par la Sécurité sociale il y a deux ans. Il l’a attrapé dans « l’usine de [leur] vie », là où leur amour est né : Saft Nersac, en Charente, à quelques kilomètres d’Angoulême, où l’on fabrique des batteries haute technologie pour l’industrie et la Défense (devenue Arts Energy en juillet 2013 après avoir été cédée pour l’euro symbolique au fonds d’investissement Active’Invest). (...)

Ce mardi 10 novembre, elle ne pourra pas assister au « procès » qui se joue devant le tribunal correctionnel d’Angoulême en Charente. Plus de soixante-dix ouvriers, dont elle, poursuivent le groupe Saft ainsi que cinq de leurs dirigeants pour « mise en danger de la vie d’autrui ». « Un procès extrêmement rare dans le contexte des risques professionnels », rappelle leur avocate Marie-Laure Dufresne-Castets, du barreau de Paris.

C’est la suite du combat judiciaire entamé il y a trois ans quand, en juillet 2012, la direction a annoncé la cession du site de Nersac, dédié à l’activité petite batterie (SNB pour Small Nickel Battery). Officiellement, il ne faisait plus partie des « objectifs stratégiques » de la société, multinationale française éclatante, leader mondial des batteries de haute technologie (678,4 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2014). Un argument de façade pour les syndicats, convaincus que cette cession pour l’euro symbolique à « des bandits », un fonds d’investissement aux reins pas très solides selon les experts mandatés par le comité central d’entreprise, plusieurs fois condamné par les tribunaux, est en réalité l’ultime moyen trouvé par la direction pour éluder ses responsabilités et se débarrasser d’un vilain petit canard qui mène une bataille de longue haleine pour la prise en compte du risque cadmium dans l’usine.

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Photo : Peterappelroscc by-sa

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