Éclaboussant des boîtiers électriques, la fuite a provoqué un défaut d’isolement sur un tableau électrique, qui est en lien avec l’alimentation de circuits de commande de disjoncteurs, électrovannes, « parmi lesquels figurent les éléments importants pour la protection » du réacteur nucléaire, décrit l’ASN. Un « défaut d’étanchéité » qui n’est donc pas si bénin que cela dans la plus vieille centrale nucléaire de France.
Le 5 mars, quelques minutes après une inspection de l’ASN suite à cet « incident », une seconde rupture de canalisation se produit, sur la même tuyauterie. Celle-ci avait été remise en service « alors même qu’EDF n’avait toujours pas identifié les causes de la rupture », dénonce le réseau Sortir du nucléaire. « Comment pouvez‐vous autoriser le redémarrage d’un réacteur nucléaire alors que des "éléments importants pour la "protection" sont alimentés par un boîtier peut‐être défectueux ? », s’alarme cinq associations hostiles au nucléaire dans une lettre ouverte au directeur de la centrale.
Quand EDF donne des « informations contraires » à l’ASN
L’inspection « a mis en évidence un manque de rigueur dans le processus de traitement des écarts et la prise en compte du retour d’expérience », pointe le rapport le l’ASN. Qui critique le fait que la direction de la centrale n’a pas mené de « campagne d’investigation précise des matériels potentiellement impactés par les projections d’eau ». Et que la tuyauterie a été remise en service prématurément, alors qu’une information contraire a été donnée aux inspecteurs de l’ASN : selon les déclarations d’EDF, la tuyauterie ne devait être remise en service que plusieurs semaines plus tard !
Lors de ce deuxième incident, l’ensemble du personnel n’a pas été évacué, croyant qu’il s’agissait d’un essai de sirène [1] ! Interrogé lors d’une séance de la Commission locale d’information et de surveillance (CLIS) quelques jours plus tard, le directeur de la centrale a minimisé ces incidents. « Mensonge à l’ASN, omission auprès de la CLIS : les agissements d’EDF laissent plus que songeur quant à l’attitude que l’entreprise adopterait en cas d’accident de grande ampleur ! », s’indigne le réseau Sortir du nucléaire.
Cet « incident » n’est pas isolé, rappelle l’association : « Déjà, en avril 2014, une série de mauvaises manipulations avaient provoqué le débordement d’un réservoir, cette inondation ayant ensuite débouché sur un court-circuit et forcé à un arrêt en urgence du réacteur n°1 ». Le réseau Sortir du nucléaire étudie actuellement l’éventualité d’un dépôt de plainte, pour faire la lumière sur les problèmes pointés par ces incidents.
Agnès Rousseaux
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Photo : Florival fr cc by-sa