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03.10.2014 • Nucléaire

Areva : contrat très contesté en Afrique du Sud

Les autorités sud-africaines ont récemment octroyé à Areva un contrat d’une valeur d’environ 300 millions d’euros, pour rénover la centrale nucléaire de Koeberg. Une bonne nouvelle en apparence pour la firme française, d’autant que se profile à l’horizon un autre marché, celui de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires dans le pays. Mais la procédure d’appel d’offres semble avoir été entachée de nombreuses irrégularités, et les concurrents malheureux d’Areva portent aujourd’hui l’affaire dans les tribunaux. Une nouvelle illustration des pratiques étranges du groupe nucléaire français dans cette région du monde.

Publié le 3 octobre 2014 , par Olivier Petitjean

La centrale nucléaire de Koeberg - la seule d’Afrique du Sud - a été construite par les ancêtres d’Areva en plein apartheid, avec la bénédiction du gouvernement français (lire notre enquête). D’une capacité de 1800 MW, elle est localisée à proximité du Cap et gérée par Eskom, l’entreprise publique sud-africaine de l’énergie.

L’appel d’offres pour sa rénovation a été initialement lancé en 2010, et la procédure s’est éternisée durant de longs mois du fait de tiraillements au sein d’Eskom. Par deux fois, le contrat de rénovation aurait été octroyé au concurrent américain d’Areva, Westinghouse, par des comités techniques. Par deux fois, les dirigeants politiques d’Eskom sont revenus sur ces décisions, avant d’attribuer officiellement le contrat à Areva en août.

Relations troubles

Westinghouse a immédiatement lancé un recours devant les tribunaux sud-africains. Les documents internes d’Eskom, examinés par amaBhungane, le collectif de journalistes d’investigation du quotidien sud-africain Mail & Guardian, confirmeraient que la procédure a été marquée par de nombreuses irrégularités, et qu’Areva a été favorisée par les dirigeants d’Eskom.

Les mêmes journalistes reviennent également en détail sur la visite en France, tous frais payés par EDF, d’une des membres du Conseil d’administration d’Eskom, présidente du comité en charge de gérer les appels d’offres. Une autre illustration, selon eux, des relations troubles entre certains dirigeants de l’entreprise publique sud-africaine et le lobby nucléaire français.

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De nouveaux réacteurs en ligne de mire

Ce contrat de rénovation pouvait sembler de bonne augure dans la mesure où l’Afrique du Sud figure parmi les rares pays auxquels Areva peut encore compter vendre sa technologie EPR. Il dépend à ce jour du charbon pour 80% de son électricité, et le gouvernement sud-africain envisage de construire jusqu’à 9600 MW de capacité nucléaire supplémentaire. Mais beaucoup d’incertitudes pèsent encore sur la réalisation de ce programme, notamment - comme c’est souvent le cas dans le domaine nucléaire - pour des raisons de coût. Une partie des milieux dirigeants sud-africains et certaines agences gouvernementales s’y sont explicitement opposés.

Et on peut désormais se demander si Areva a réellement un chance de remporter ce marché de toute façon, dans la mesure où l’Afrique du Sud vient de signer un partenariat nucléaire avec la Russie, qui prévoit explicitement la possibilité que ce cette capacité nucléaire soit construite par le concurrent russe d’Areva, Rosatom.

Mirage sud-africain ?

Les intérêts d’Areva en Afrique du Sud sont déjà au centre de l’affaire UraMin - la société minière canadienne rachetée au prix fort par Areva pour trois gisements africains extrêmement décevants. En 2012, le Mail & Guardian avançait l’explication selon laquelle Areva avait sciemment surpayé UraMin pour s’acheter les faveurs de Thabo Mbeki, alors président de l’Afrique du Sud, en vue d’obtenir la construction de ses réacteurs EPR dans le pays. Hélas pour l’entreprise française, Mbeki s’était fait renverser quelques mois plus tard. Et son successeur Jakob Zuma semble aujourd’hui privilégier la piste russe.

Le pire de l’histoire est peut-être que le contrat de la rénovation de Koeberg, obtenu dans des conditions aussi controversées, ne va même pas forcément profiter aux salariés français du groupe. En effet, selon la CGT, les dirigeants du groupe ont indiqué en comité d’établissement que la plus grosse partie des équipements concernés (générateurs de vapeur) seraient fabriqués en Chine et au Japon.

Olivier Petitjean

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Photo : jbdodane CC

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